- Randall Bartlett
Économiste en chef adjoint
Lorsque les menaces tarifaires américaines changent, nos prévisions changent elles aussi
La semaine dernière, nous avons publié nos prévisions de base révisées Lien externe au site. pour l’économie canadienne. Étant donné le caractère erratique du programme économique au sud de la frontière, nous avons dû augmenter l’effet des tarifs douaniers par rapport à nos prévisions publiées juste avant Noël. Nos prévisions de base pour le PIB réel et le taux de chômage se rapprochent maintenant davantage de celles de notre scénario pessimiste, bien qu’elles soient tout de même moins sombres que dans ce dernier (graphique 1). Notre scénario de base suppose des tarifs de 10 % appliqués uniformément aux importations américaines depuis le Canada à compter du 1er avril, avec une exemption pour l’énergie, comparativement à des tarifs de 25 % dans le scénario pessimiste.
Lorsqu’on regarde le détail de nos perspectives révisées pour le PIB réel, on y trouve peu de bonnes nouvelles (graphique 2). L’investissement des entreprises risque d’être morose, car l’incertitude liée aux menaces tarifaires changeantes incitera probablement les dirigeants d’entreprises à rester sur la ligne de côté. La hausse des exportations en raison du devancement de certaines transactions avant l’entrée en vigueur des droits de douane devrait aussi être moindre que prévu puisque l’administration Trump menace d’imposer des tarifs plus tôt que ce que l’on croyait précédemment. Personne ne sait ce qui arrivera si de nouveaux tarifs considérables entrent en vigueur et que les chaînes d’approvisionnement nord‑américaines commencent à se dissocier. Cela s’ajoute à la morosité de l’investissement des entreprises et de la productivité au Canada ces dernières années, surtout comparativement aux États‑Unis. Même si la croissance de la consommation par habitant est appelée à augmenter étant donné que la réduction des admissions de résidents permanents et non permanents freinera la croissance démographique, elle risque de demeurer faible. Les renouvellements hypothécaires à des taux d’intérêt plus hauts, les prix encore élevés et l’augmentation du taux de chômage devraient également nuire à la confiance des consommateurs et à la croissance globale de la consommation. En fait, les dépenses des gouvernements sont le seul moteur notable de la demande intérieure que nous entrevoyons au cours de l’année à venir puisque les décideurs canadiens voudront soutenir les ménages, les entreprises et les industries touchés par les tarifs Lien externe au site.. Toutefois, la croissance de la demande intérieure ne pourra vraisemblablement pas compenser l’effet néfaste des échanges commerciaux sans l’aide des stocks.
Même si la croissance de l’activité économique et de l’emploi devrait être plus lente que prévu, l’effet à la baisse sur l’inflation ne suffira pas à contrebalancer l’effet haussier des tarifs américains et des mesures de représailles sur les prix. Dans notre scénario de base, la variation annuelle des prix à la consommation pourrait ainsi dépasser 2,5 % au cours des prochains mois, et même dépasser 3 % en cas d’escalade de la guerre commerciale (graphique 3). Nous avons eu un aperçu des produits américains qui pourraient faire l’objet de droits de représailles à l’importation, notamment les aliments frais et transformés. Les biens de consommation et les intrants intermédiaires devraient aussi faire partie du lot. Cela fera grimper l’inflation des biens de base, en plus des prix des aliments et du carburant importés des États‑Unis. Même en l’absence de tarifs, l’inflation au Canada serait plus élevée actuellement si ce n’était du congé de TPS/TVH Lien externe au site., qui a entraîné une distorsion des données sur les prix à la consommation à compter de décembre. Cette distorsion sera complètement dans le rétroviseur au mois de mars.
Cela dit, les perspectives économiques ne sont pas que mauvaises pour le Canada. La réduction des barrières au commerce intérieur pourrait contribuer à la productivité et à la croissance du PIB réel par habitant au Canada. Nous demeurons toutefois sceptiques quant à la probabilité de voir s’opérer un changement important à cet égard. Même si le discours récent sur la volonté de faciliter le commerce interprovincial laisse place à l’optimisme, ce n’est pas la première fois que nous l’entendons. Comme pour toute politique dont les bénéfices sont concentrés, mais dont les coûts sont répartis entre un grand nombre de Canadiens, le changement sera difficile. Nous sommes aussi sceptiques envers les efforts de diversification du commerce international. Les entreprises appartenant à des immigrants sont généralement celles dont les échanges commerciaux sont les plus diversifiés, et les récents changements à la politique d’immigration iront donc à l’encontre de cette tendance. Et si le président Trump choisit de ne pas mettre ses menaces à exécution, les entreprises canadiennes sont peu susceptibles de modifier leurs habitudes. Pour toutes ces raisons, combinées à la baisse probable de l’investissement des entreprises dans son ensemble, nous n’avons pas incorporé une croissance nettement supérieure de la productivité à moyen terme dans nos projections. Ainsi, lorsque les menaces tarifaires américaines changent, nos prévisions économiques pour le Canada changent aussi.
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